Le mardi 13 mars de 18h à 19h 30, nous avons visité :
La Maison Bergeret
Depuis 1975, la Présidence de l'Université Henri Poincaré est installée dans une maison de maître du début du
siècle, une des plus belles constructions dans le style de l'Ecole de Nancy.
C'est dans un quartier Saint-Pierre encore à l'état de faubourg que s'implante l'imprimeur Albert Bergeret.
Cet ancien employé de l'imprimerie Royer achète à son ancien patron une parcelle rue Lionnois et confie à l'architecte
Lucien Weissenburger la construction de sa nouvelle imprimerie de 1901 à 1902, ainsi que son agrandissement on 1903.
Il est à noter que Weissenburger est déjà l'auteur de la reconstruction de l'imprimerie Royer, rue de la Salpétrière
en 1900, l'un des premiers bâtiments de Nancy dans le style Art nouveau. Bergeret, qui a fondé sa rapide fortune sur la
diffusion sans précédent de la carte postale illustrée, fait édifier de 1903 à 1904 une maison de prestige à angle droit
de l'usine, toujours par le même architecte. Les plus grands artistes de "l'Alliance Provinciale des Industries d'Art",
vont intervenir dans le décor des deux édifices, à l'exception de son fondateur Emile GalIé alors très atteint par la
maladie qui devait le terrasser à la fin de 1904.

Contrairement à beaucoup de bâtiments nancéiens qui n'affichent l'influence de l'Art Nouveau que sur leur seule
façade, la Maison Bergeret est entièrement décorée et meublée dans ce style. Elle est en cela la digne descendante de la
villa construite à Nancy de 1901 à 1902 pour le fabricant de meubles Louis Majorelle par l'architecte - décorateur parisien
Henri Sauvage. villa dont Lucien Weissenburger avait justement été l'archltecte d'exécution. Tout en étant d'un goût
profondément moderne, la Maison Bergeret emploie, concurremment avec une charpente métallique, les matériaux
traditionnellement utilisée à Nancy pour les façades, à savoir la pierre d'Euville pour le socle et de Savonnières pour
les élévations.
Le plan de la maison, s'il ne révolutionne pas les conceptions couramment admises à l'époque fait montre d'une
exceptionnelle virtuosité dans la répartition des pièces au rez de chaussée où le hall et la salle à manger servant
d'espace de distribution permettent à l'architecte de supprimer tout couloir. On constate par ailleurs une nette
séparation entre les circuits de circulation de la domesticité et des maîtres de maison.
La relative sobriété dans la décoration florale extérieure, cantonnée à la représentation de la monnaie du pape
contraste avec l'importante mouluration sculptée animant la façade dans les trois dimensions. Ce thème de la monnaie du
pape se retrouve également sur les ferronneries, exécutées par Eugène Soutif à l'extérieur, et créée par Louis Majorelle
à l'intérieur. Ce dernier intervient aussi comme décorateur en meublant entièrement le salon avec du mobilier de série
fabriqué dans son usine, mobilier fortement diffusé dans les intérieurs de la moyenne bourgeoisie nancéienne.
Très différent est le type de travail confié à l'atelier artisanal d'Eugène Vallin, spécialisé dans la réalisation
de menuiseries et de mobiliers moderne d'une très haute qualité d'exécution, réservés à quelques grosses fortunes locales.
Tout au long de l'année 1904. Vallin exécute la totalité de la menuiserie de la maison, décore et meuble de façon complète
plusieurs pièces: la sale à manger, le cabinet de travail et la chambre des maîtres de maison.
Le vitrail civil, devenu après 1900 l'une des grandes spécialités de l'art décoratif nancéien, trouve dans la
Maison Bergeret l'un de ses lieux d'élection avec les somptueuses verrières sur rue réalisées par le plus connu de ses
praticiens: Jacques Gruber. Le hall on particulier, est orné d'une des ses plus grandes verrières privées: Roses et
Mouettes. Un second artisan, Joseph Janin, moins célèbre mais dont l'atelier est tout proche, se voit confier les vitraux
intérieurs insérés dans les menuiseries, ceux des lucarnes ainsi que ceux de la véranda, bordés d'étonnantes briques de
verre. (système Falconnier).

Même le futur successeur d'Emile Gallé à la Présidence de l'Ecole de Nancy, le peintre et sculpteur Victor Prouvé,
dont les portraits de personnalités et de familles nancéiennes sont fort nombreux et qui collabore avec plusieurs ateliers
nancéiens, est présent à l'intérieur de la Maison Bergeret avec l'immense toile décorative qu'il place au plafond du hall.
Par la qualité de ses intervenants et l'homogénéité de style, cette demeure se place au tout premier rang de l'art
de l'habitat à Nancy et peut rivaliser avec les meilleures réalisations contemporaines de Paris.
La Maison Bergeret, rachetée avec une partie de son mobilier par l'Etat après la guerre de 1939-1945, a longtemps
abrité le secrétariat de la Faculté de Médecine voisine. Elle a alors subi d'importantes déprédations, perpétrées à une
époque où l'Ecole de Nancy était en complète disgrâce. Les premières mesures de conservation ne sont prises qu'à partir de
1975 par l'inscription des façades à l'inventaire des Monuments Historiques, puis en 1989 par le début de la restauration
des intérieurs. La maison est enfin protégée en totalité en 1995
Frédéric Descouturelle - Association des Amis du Musée de l'Ecole de Nancy
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