Est Républicain du 2-12-2001

TRAM : l'heure de vérité



La marche à blanc intensive, déterminante pour une remise en service commercial démarre lundi. Un an après l'inauguration du tram !


"Madame Chirac se porte bien. Et le tram se porte bien". Près d'un an après l'inauguration d'un tram (le 8 décembre 2000) dont on attend toujours la mise en service, André Rossinot n'hésite pas à manier l'ironie en commentant les manifestations "politiques" dit-il, prévues par l'opposition pour cet anniversaire... inédit !

Le président du Grand Nancy a en tout cas pris les devants hier. Conforté par les résultats (qui tombent à pic... ) de la marche à blanc (partielle) des deux dernières semaines. Selon Thierry Marchal, directeur adjoint des services techniques, le parc de véhicules injecté sur la ligne atteindrait un taux de disponibilité (proportion du service prévu et réellement assuré) de 90 %. En dépit des immobilisations signalées ici ou là ces derniers jours. "Car il faut dissocier les trams effectivement engagés dans la marche à blanc de ceux encore en période de déverminage" souligne le vice-président Christian Parra. Et ce sont ces derniers qui, bien-sûr, auraient dernièrement connu l'essentiel des pépins...

18 trams demain

Depuis septembre, on sait néanmoins que 780 défauts ont été relevés pendant la marche à blanc proprement dite. Dont 13 % rédhibitoires en exploitation (arrêt de plus de 5 mn, évacuation nécessaire de voyageurs...). Mais au terme de 28.000 km parcourus, "l'évolution est positive". A fin novembre, les courbes de défauts ont littéralement dégringolé.

Le seuil des 90 % est en tout cas déterminant. Car c'est un des critères fixés dans le cahier des charges pour une éventuelle remise en service commercial. Mais ce seuil doit être atteint dans des conditions similaires à un fonctionnement avec voyageurs circulation du matin au soir (6 à 19 h), fréquences de 5 mn aux heures de pointe et de 7 à 8 aux heures creuses...

Cette marche à blanc intensive et cruciale démarrera demain matin et pour quinze jours au moins. L'instant de vérité pour le tramway. 18 véhicules (dont 2 en réserve) seront en ligne pour cette première semaine. 21 (dont 3 de réserve) la seconde. Par mesure de sécurité et en raison de l'affluence au centre ville, ces essais cadencés seront suspendus du samedi midi au lundi matin.

"On assume !"

A la mi-décembre, le tram devra avoir fait ses preuves pour espérer une remise en service début 2002. Tout sera épluché au jour le jour de la régularité de passage aux arrêts jusqu'à la fiabilité des équipements de la ligne, et se soldera par un bilan transmis aux services de l'Etat. Quel que soit le résultat, les véhicules continueront à occuper massivement le terrain une semaine encore avant que ne s'instaure un dispositif allégé... en attendant l'éventuelle mise à feu. Qu'imagine déjà André Rossinot : "Dès la reprise, nous innoverons en créant un comité de lignes qui réunira usagers, associations, élus des communes... pour travailler en permanence à l'amélioration des services, à la création de nouveaux". Commentaire de circonstance à la veille du 8 décembre. "La CUGN assume son projet, la technologie. Le temps écoulé n'a pas été du temps perdu! Notre objectif reste de garantir un réseau performant avec un tram fiable et disponible, des correspondances rapides et régulières". Les usagers qui rament depuis un an n'en attendent pas moins !

"Modifications et améliorations"

La marche à blanc intensive se déroulera sur l'intégralité de la ligne. Après les incidents à répétition qui se sont pro-duits à Essey à un endroit où le tram circule en mode rou-tier, des adaptations ont été réalisées.

L'îlot central au carrefour de la rue des Prés et de l'avenue Leclerc a été supprimé : le tram n'empruntera plus, dans ce secteur, sa plate-forme dans le sens Mouzimpré-Nancy mais la file de circulation Au carrefour Foch-Roosevelt, la plate-forme a été élargie et un repère visuel installé pour les chauffeurs.

Des travaux ont également été réalisés sur Vandœuvre, même si aucun incident n'avait été signalé. Au carrefour Blum-Jean-Jaurès, le trottoir a été allongé pour supprimer des places de stationnement susceptibles de gêner le tram. Rue du Docteur Gadol, des places de stationnement ont été transférées pour élargir la voie de circulation.

Des travaux plus importants sont programmés en 2003 pour réaménager la place du Vélodrome afin de permettre un tracé rectiligne de la ligne et éviter les contorsions du train dans les rues Blum et Gadol.

Doubles correspondances

La CGFTE a également tiré les leçons de la (courte) ex-ploitation commerciale de février-mars. Des adaptations sont prévues pour la remise en exploitation commerciale renforcement de certaines lignes de minibus, prolonge-ments de lignes au centre-ville pour éviter le phénomène des doubles correspondances, rabattement de la ligne de Seichamps sur le terminus de Mouzimpré (et non plus le centre d'Essey), adaptations de lignes de bus conséquentes sur Vandœuvre.

Le dispositif sera détaillé ultérieurement.

Entre gratuité et hausse des tarifs



Une phase de gratuité devrait accompagner la remise en service. Mais une révision des tarifs des transports, gelés en 2001, se profile à l'horizon


Janvier ? Février ? On se garde bien de tout pronostic précis au Grand Nancy. Même si l'on fait comprendre que l'objectif de remise en service, c'est le tout début 2002. Certitude si la marche à blanc intensive est concluante, le tram devra, pour ob-tenir un feu vert de la préfecture, suivre une procédure administrative de deux à trois semaines.

Signe d'optimisme calculé ? La Communauté urbaine annonce déjà que cette nouvelle mise à feu sera précédée d'une "campagne de com-munication importante", menée par la CGFTE. Il est vrai qu'on a eu largement le temps de la préparer Mais elle portera aussi sur des mo-difications apportées au réseau de bus. Et devra réconcilier des Nancéiens échaudés avec leurs transports en commun ! Tendance révélatrice (même si les avatars du tram n'expliquent pas tout) le tra-fic routier dans la ville a augmenté de 3 à 4 % de 2000 à 2001.

Coût d'exploitation

Sortira-t-on alors l'atout de la gra-tuité temporaire ? Le scénario pa-raît incontournable. Sauf écueil d'ordre électoral (ce qui avait été le cas en janvier 2000 puisque la cam-pagne des municipales battait son plein). Si on dit y réfléchir au Grand Nancy, c'est plutôt sur sa forme et sa durée. En revanche, guère d'illusion à avoir sur un gel en 2002 des tarifs prati-qués sur le réseau. Gel qui avait été décidé pour 2001. La dernière hausse "les révisions sont générale-ment appliquées en février" remonte à début 2000. Si hausse (quasi certaine) il y a dans les mois prochains, on rappelle au Grand Nancy qu'elle est toujours encadrée par le minis-tère et qu'elle ne sera due ni aux pé-ripéties du tram, ni à l'euro ("qui entraînera des ajustements, sans va-riations au global") mais à l'augmentation des coûts d'exploitation. "Notamment avec les 35 heures"

Le contentieux

Reste à savoir qui va payer la note du feuilleton tram. Le Grand Nancy refuse toujours, au motif que les comptes seront réalisés au final, de donner le coût du réseau de bus de substitution. Pas de chiffres non plus sur la facture globale du dos-sier tram. "Qui n'atteindra pas le milliard quatre avancé par certains ! Quant aux discussions sur les pénalités qui devraient frapper Bombardier, " nous n'en sommes qu'aux préliminaires !" réplique Christian Parra. "Il n'y aura pas de discussion à l'amiable sur un coin de table. Ce sera à dire d'experts, en présence des avocats. Et André Rossinot de marteler : "c'est à titre conservatoire et pour préserver le intérêts de la collectivité que nous avons demandé au tribunal administratif la désignation d'un expert (NDLR nommé en avril)

C'est dans le même objectif que la CUGN a obtenu, de cette instance, la nomination, le 24 octobre, d'un autre expert chargé, dans le cadre de la marche à blanc, de constater l'état des véhicules et notamment les modifications apportées.

Ghislain UTARD

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